Pour que je entre en scène, moi doit céder la place. Comme c’est étrange. C’est que moi s’agite, bavard et belliqueux, alourdi par la liste bruyante des fardeaux. Je, lui, est rebelle aux ordres, indompté, mais il est doux, pacifique et secret ; il attend aux portes et veut le silence pour paraître. Que moi s’oublie, que vienne l’obscurité, yeux clos, sans intention, sans vouloir, sans mémoire, sans bouche qui s’ouvre, alors, de profondeurs qui n’appartiennent à personne, comme les sables paisibles des océans s’enivrent d’être roulés par les vagues, encre de seiche, encre de nuit, ou comme les fleurs de papier pliées serré déploient leur tige et se redressent sous deux gouttes d’eau, affleurent des images ou des pensées, une parole, une musique enfin, et avec elle, forme inachevée ou libre, qu’importe, forme en mouvement, onde solitaire remontant le courant — un sujet. |