Qu'on ne se trompe pas sur mon compte, sous prétexte que j'ai mes idées. Il serait injuste de douter de ma capacité à me comporter comme un honnête citoyen. Il est ardu de faire le bien, la vertu n'est pas facile à pratiquer, rester fidèle à ses principes n'est pas aisé, on ne voudrait pas mourir par devoir. Tout est tourment pour chacun de nous. Pour vaincre la souffrance, il faut découvrir un plaisir capable de l'emporter sur l'angoisse. Peinture, poésie, théâtre ne sont que les autres noms de ce plaisir dissimulé dans le malheur. Comprendre cette vérité nous engage pour la première fois à devenir héroïque, à devenir raffiné, à surmonter tous les tourments pour tendre à la perfection, une perfection sans mélange, qui satisfait à toutes nos aspirations. On oublie les souffrances du corps, on fait fi de l'incommodité matérielle, avec un coeur audacieux et pur, on se réjouirait d'être brûlé du dernier supplice pour cause de l'humanité. Si on pouvait donner une définition de l'art sans quitter la base étroite des sentiments naturels, l'art est la cristallisation de ce désir, enfoui dans le coeur des hommes éclairés que nous sommes, d'éviter le mal et d'oeuvrer pour la justice, fuir les errances pour marcher droit, venir en aide aux faibles et renverser les forts - mû par la volonté de ne pas plier devant l'injustice, l'art réfléchit la lumière éclatante du soleil. |