- Si j'avais su, ce matin..., me suis- je efforcé à dire. Mais un geste rapide de sa main a fait barrage à tout mot superflu. Comme en proie à une immense fatigue, il a rétorqué d'une voix faible: "Je t'en prie, ne te justifie pas, non, vraiment ! Excuses, précisions, explications, ce ne sont que des pièces sur des vêtements déchirés. Souvenons- nous plutôt de Homère...Je cite de mémoire, au besoin, corrige- moi: "Apaise- toi, mon cœur, tu as supporté bien d'autres tourments...Je te laisse à tes études." Il a abandonné l'étagère et, presque malgré lui, m'a pressé l'épaule. Sa main était légère, fragile, sur ma chemise et sur mes os. "Pourquoi trembles- tu ? a- t- il murmuré avec un brin d'inquiétude. N'aie pas peur. Je peux te faire du bien, sache- le. Ce soir, nous parlerons au café. Quant à ta tante..." Tout en rougissant, j'ai essayé en vain de le devancer, de l'assurer de ma discrétion par de vifs hochements de tête. Mais il a continué sans me regarder, au prix d'un effort que sa respiration trahissait: "Elle vit dans son monde de poupées. Une véritable crèche. De nombreuses femmes sont ainsi, et c'est ce qui les rend insubmersibles. C'est un monde logique, pour ta tante. Alors, pourquoi la déranger ? Pourquoi réveiller les belles au bois dormant ? Bien, Tino, je vois que nous nous sommes compris. A ce soir." |