Le Salon, vu du dehors, me plaît, avec ses tentes, qui lui donnent un air de cirque monté par quelque Barnum; mais quelles sales gueules d'artistes vont le remplir : y en aura, y en aura : des rapins aux longs cheveux, des littérateurs aux longs cheveux; des rapins aux courts cheveux, des littérateurs aux courts cheveux; des rapins mal vêtus, des littérateurs mal vêtus; des rapins bien habillés, des littérateurs bien habillés; des rapins aux sales gueules, des littérateurs aux sales gueules; des rapins aux chics gueules...il n'y en a pas...il n'y en a pas; mais il y a des artistes, nom de Dieu ! Dans la rue on ne verra bientôt plus que des artistes et l'on aura toutes les peines du monde à y découvrir un homme. Ils sont partout; les cafés en sont pleins, de nouvelles académies de peinture ouvrent chaque jour. A ce propos je me suis toujours demandé comment un professeur de peinture, s'il n'enseigne pas la copie à un serrurier, ait pu, depuis que le monde existe, trouver un seul élève. On se moque des clients des chiromanciennes ou cartomanciennes et l'on n'a jamais d'ironie pour les naïfs qui fréquentent les académies de peinture. Peut-on apprendre à dessiner, peindre, avoir du talent ou du génie ? |