La pluie, torrentielle et écumeuse comme du lait, se déversa sous l'orage avec un rugissement féroce et fracassant. La fourmilière fut à demi détruite et les cataractes entraînèrent dans leur ruissellement les habitants par milliers. Les insectes survivants restèrent collés aux grandes feuilles de bananiers chues à terre lors de la coupe effectuée quelques jours auparavant dans la plantation. La grosse compagnie bananière avait dû récolter ses derniers régimes quelques semaines auparavant. Ensuite viendraient les nouvelles semailles et par les travaux communs à toute zone bananière. La boue avait transformé la fourmilière en marécage et en sables mouvants qui rendaient très difficile la progression des insectes. Il fallut attendre le retour du soleil et l'assèchement des mares pour que les fourmis réorganisent leur monde et se dirigent en caravane pressée vers la partie la plus élevée du monticule, où elles s'adonnèrent une fois de plus à leur vieille manie d'élever des murailles et des pyramides sur les matières inertes ou sur les carcasses de boeufs dévorées par les vautours. C'est ainsi qu'elles édifiaient directement leurs bastions sur leur source d'approvisionnement. Une fois cette construction terminée, elles retourneraient à leur base et chercheraient un endroit plus profitable. |