L’esprit des profondeurs a soumis toute la fierté et tout l’orgueil du discernement. Il m’a ôté la foi en la science, il m’a privé de la joie d’expliquer et de classifier, et il a fait s’éteindre en moi l’enthousiasme pour les idéaux de ce temps. Il m’a contraint à descendre vers les choses ultimes et les plus simples.
L’esprit des profondeurs s’est emparé de mon entendement et de toutes mes connaissances, et les a mis au service de ce qui est inexplicable et qui va à l’encontre du sens. Il m’a privé de la parole et de l’écriture pour tout ce qui n’était pas au service de cette seule chose, cette fusion du sens et du contre-sens qui produit le sur-sens.
Mais le sur-sens est la voie, le chemin et le pont vers l’à-venir.
C’est le Dieu à venir. Ce n’est pas le Dieu à venir lui-même, mais son image, qui apparaît dans le sur-sens. Dieu est une image et ceux qui l’adorent doivent l’adorer dans l’image du sur-sens.
Le sur-sens n’est pas sens, pas plus qu’il n’est contre-sens, il est à la fois image et force, magnificence et force réunies.Le sur-sens est commencement et but. Il est le pont du passage et de l’accomplissement.
Les autres dieux sont morts de leur temporalité, mais le sur-sens ne meurt pas, il se transforme en sens puis en contre-sens, et du feu et du sang de la collision des deux s’élève à nouveau, rajeuni, le sur-sens.L’image de Dieu a une ombre. Le sur-sens est réel et projette une ombre. Car qu’est-ce qui pourrait être réel et physique sans posséder une ombre ?
L’ombre est le non-sens. Elle est sans force et n’existe pas par elle-même. Mais le non sens est le frère inséparable et immortel du sur-sens.
Les humains grandissent comme les plantes, les uns à la lumière, les autres à l’ombre. Nombreux sont ceux qui ont besoin de l’ombre et pas de la lumière.
L’image de Dieu projette une ombre qui est aussi grande qu’elle-même.
Le sur-sens est grand et petit, il est aussi étendu que l’espace du ciel étoilé et aussi étroit que la cellule du corps vivant.